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Hommage à François Yvinec

« François savait où il voulait aller »

 

Le 4 novembre, à l’âge de 89 ans, François Yvinec est décédé en Espagne, où il résidait depuis une vingtaine d’années. Jusqu’au bout, il a gardé un œil sur ce club pour lequel il a tant donné et qui représentait tout pour lui. Administrateur du club sous la présidence Yvinec (de 1981 à 1991) puis président de 2013 à 2016, Yvon Kermarec évoque un personnage déterminé, meneur d’hommes et grand artisan du football professionnel à Brest.

 

 

« Yvon, que représente pour vous le décès de François Yvinec ?
Une très grande tristesse, c’était pour moi plus qu’un président, plus qu’un ami. J’ai une pensée très émue pour son épouse Maïté, nous avons passé tellement de bons moments en Espagne. Ce décès est forcément quelque chose de marquant. François a été une image très forte de la vie du Stade Brestois et lui a donné ses lettres de noblesse. Le club a pris grâce à lui une vraie importance dans le football français.


A-t-il selon vous été satisfait de sa décennie de présidence ?
François était quelqu’un d’ambitieux pour Brest et il voulait en faire l’un des bastions importants du foot français mais l’histoire du Brest Armorique s’est terminée tragiquement et le club a mis pas mal de temps à s’en remettre. Deux personnes ont beaucoup compté pour lui. Il y avait l’ancien maire de Brest, Francis Le Blé (décédé en juin 1982) qui était partisan de faire un grand stade dans la ville et c’est d’ailleurs sous son ère qu’a été construite la tribune Foucauld. Il y avait aussi François-Paul Bordais (décédé en décembre 1986) qui était le patron des E.Leclerc de Brest et Landerneau et qui l’a beaucoup épaulé. Leur disparition a fait que pas mal de choses se sont écroulées par la suite.


Au quotidien, quel homme était-il ?
Il était fidèle en amitié et avait horreur de la triche, de la manipulation. François était paternaliste, très proche du personnel administratif et des joueurs. Il savait où il voulait aller. Par exemple, s’il était parti en Colombie chercher Roberto Cabañas, c’est qu’il croyait vraiment en lui parce qu’il a quand même pris des risques énormes ! Il était aussi intègre et j’ai en tête le moment où il avait cédé la présidence à Alain Guilloux (en septembre 1991). Il avait avant cela refusé de vendre quelques joueurs qui auraient pu permettre de combler le trou. Il voulait laisser à son successeur une équipe capable de rebondir, il ne voulait pas déshabiller l’effectif.


Vous évoquiez l’épisode Cabañas, ça avait été assez cocasse...
Oui, c’était un feuilleton qui passait tous les jours au 20 heures ! Quand François était en Colombie, nous nous réunissions avec Christian Le Garrec (directeur administratif du club), Jean-Paul Tixier (Sodiba) et Jean Champeau (adjoint au sport de la ville), le soir vers 22 heures à cause du décalage horaire. Au téléphone, François parlait en breton car il pensait être sur écoute. Et le jour de son évasion, il nous avait prévenus qu’il allait utiliser les ribines pour rejoindre Brest (rires).

 

 

C’était aussi un président qui connaissait très bien le foot...

Oui, il avait de vraies compétences dans ce domaine et il savait aussi parler aux joueurs. Je l’ai vu prendre la parole dans les vestiaires à la mi-temps de matches qui étaient mal engagés... Il avait cette capacité à les remotiver et tout changeait sur le terrain par la suite. Il avait un vrai sens tactique, j’ai rarement vu des présidents aussi connaisseurs.


François Yvinec a aussi été à l’origine du Centre de formation brestois...
On n’avait pas les moyens pour rivaliser avec Bordeaux et Marseille à l’époque alors il comptait beaucoup sur le Centre de Formation et ça a été une réussite parce qu’on a quand même gagné la Coupe Gambardella en 1990 avec notamment Makélélé, Guivarch, les frères David... Il y avait beaucoup de beau monde. Plus globalement, il a mis en place les structures d’un club professionnel qui n’existaient pas à l’époque.


Beaucoup de Brestois disent encore aujourd’hui que l’époque Yvinec est celle qui leur a donné le plus de plaisir. Vous comprenez cela ?
Oui très bien, notamment quand on se rappelle des joueurs qui avaient rejoint le club comme Júlio César, José Luis Brown, Bernard Lama, David Ginola...etc...des gars emblématiques. Le jeu de Brest faisait aussi rêver, on n’avait peur d’aucune grosse équipe. C’était le début ici d’un foot professionnel bien ancré. On voyait les gens affluer à l’Armoricaine, ils remontaient la rue Jean Jaurès, ils arrivaient par car de tout le Finistère Nord. On montait sur les pylônes d’éclairage pour regarder les matches. Bref, c’était la fête quand Brest jouait.


Avez-vous en tête une anecdote amusante avec François Yvinec ?
Il avait vraiment l’amour du club et deux jours avant de partir, il s’inquiétait encore du résultat de Brest face à Monaco. Il avait été rassuré par la victoire. Il suivait tous les résultats, même depuis l’Espagne où il résidait. Je me rappelle aussi qu’à l’issue de ma deuxième année de présidence (en 2015), juste après avoir échoué de peu pour la montée, il m’avait téléphoné : « T’aurais pu m’appeler, je t’aurais donné quelques conseils pour mener à bien ton projet » (rires)

 

 

Denis Le Saint : « Tout un pan de notre club qui s’en va »

 

« Avec la disparition de François, c’est tout un pan de notre club qui s’en va. Nous sommes tristes d’avoir perdu l’un de ceux qui avaient mis tant de cœur à bâtir le club et à le placer sur la carte du football. François
a marqué son époque et durant sa décennie de présidence a fait rêver les passionnés du Brest Armorique. Il avait beau avoir quitté la direction du club il y a 30 ans, il gardait toujours un œil sur les résultats de son Stade Brestois, nous rendant même parfois visite pour notre plus grand plaisir. Nous sommes très nombreux à partager l’émoi de sa disparition et c’est évidemment à nous de faire en sorte que sa mémoire perdure. Des hommages lui seront rendus à la mesure de l’homme qu’il a été pour le club ».

 

19 nov. 2021